Autres temps, autres mœurs – et aussi autres modes d’élection et de communication –, nos leaders politiques – hommes et femmes – sont à presque tous les plans très différents de ceux de nos parents. Les analyses tirées de l’étude de leurs généalogies et présentées dans mon dernier ouvrage, Le Tout politique 2022, sont ici parfaitement parlantes. 

Évolution au plan socio-culturel…

Si autrefois – sous les IIIème et IVème Républiques –  nos chefs d’État étaient majoritairement issus des milieux intellectuels et bourgeois, ceux du XXIème siècle descendent davantage de familles dont la réussite sociale est moins ancienne et moins assise. Certes variés, les milieux familiaux expliquent souvent les choix idéologiques, avec un fossé profond entre les ancêtres de Nathalie Artaud et ceux de Bruno Le Maire, entre Julien Denormandie, descendant d’un fondateur du très aristocratique Jockey Club, et Gérald Darmanin, fils d’un tenancier de bar et d’ue femme de ménage. Avec d’autres, arrivés ici par héritage ou tradition familiale, atels Martine Aubry ou Marion Maréchal, face à une majorité n’y étant nullement préparée, comme Emmanuel Macron, Yannick Jadot…  ou mieux encore Rachida Dati ou Christiane Taubira…

Arrivent donc aujourd’hui sur la scène des rejetons de familles, dont la marche a été longue et difficile, comme les Hidalgo ou les Dupond-Moretti. Voire même de familles parties avec des handicaps, naguère difficile à remonter, comme les Montebourg, descendants d’un enfant trouvé… Mais au cours du XXème siècle, l’accès à l’enseignement et les progrès sociaux ont fait sauter les verrous, en même temps que des professions intermédiaires se sont révélées d’excellents moteurs, au plan de l’accession sociale. La plus efficace a sans nul doute été celle d’instituteur, rencontrée pour la première fois dans la généalogie de Georges Pompidou et désormais dans la majorité des arbres, face à l’effacement consommé du monde agricole et avec de plus en plus de personnalités à double – sinon triple – culture.

… et évolution géographique

L’évolution est en effet très nette au plan géographique, avec de nombreuses personnalités ayant des origines à l’étranger et la présence massive de descendants à la seconde génération d’Italiens et d’Espagnols, voire de Maghrébins, face également à une montée des ancêtres belges.

Si l’on s’en tient à l’Hexagone, le changement est tout aussi flagrant. Si beaucoup des gouvernants d’autrefois étaient originaires du Massif central, dont les ressortissants, encore dans les « années Chirac », se retrouvaient à Paris au sein de réseaux organisés et solidaires, les racines de ceux d’aujourd’hui ne cessent de se diversifier, avec toutefois des pics opposés, dans les départements du Nord/Pas-de-Calais et des Pyrénées-Atlantiques, accompagnés d’une lente remontée des natifs de ceux du Sud et notamment des racines corses. Les cas d’origines monodépartementales deviennent exceptionnels, face des records de dispersion géographique des racines, allant jusqu’à 37 départements et 8 pays différents, pour un seul de nos actuels ministres. Le « melting pot » français est une réalité ici d’autant plus forte que ceux et celles s’engageant dans le débat public sont majoritairement issus des minorités les plus actives de la population nationale, à commencer par celles ayant bougé au plan géographique ou/et social.

De la dispersion aux cousinages

Comme dans les précédentes éditions, les cousinages fusent. Toujours plus étonnants les uns que les autres, ainsi entre François Hollande et Brigitte Macron, Marine Le Pen et Gérald Darmanin – par des ancêtres maltais ! Avec là aussi des records, détenus par deux personnalités réputées justement consensuelles : François Hollande et Édouard Philippe, face au travailleur réputé solitaire qu’est Emmanuel Macron, cousin d’aucun leader de premier plan, mais en revanche descendant d’un bagnard, un Picard condamné sous Louis XV pour trafic de faux tabac. Jadot neveu de l’évêque Cauchon et Bertrand neveu de Danton, sans parler des nombreux descendants d’un roi… ou d’un prophète, avec ici un certain Mahomet…

Un travail que j’ai mené avec passion et qui, au final, a largement revalorisé à mes yeux les images de ces hommes et femmes politiques, souvent perçus comme arrivistes et démagogues, mais dont les histoires individuelles et familiales vient souvent éclairer les choix et les destins, tels ceux de Dupont-Moretti, de Castaner ou de Zemmour. Connaître la généalogie de nos politiques, a finalement pour premier effet de les rendre plus humains et de permettre de les mieux connaître et mieux comprendre.

dans mon dernier ouvrage, Le Tout politique 2022.